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jeudi 24 mai 2012

Entretien avec Tariq Sijilmassi, président de la Fédération nationale des associations de microcrédits (fnam)


«Le secteur du microcrédit repart à la hausse»

L’évolution de l’activité du microcrédit ces dernières années au Maroc est loin d’être régulière. En fait, cette activité a emprunté à un certain moment de son évolution une voie rapide, enregistrant une croissance qui a pris de court tout le monde.

#D’après Tariq Sijilmassi, le microcrédit est une activité non lucrative.
Ce que d’aucuns ont qualifié de bulle. Et comme toute croissance non fondée sur une base réelle, cette évolution a subi une forte correction, en se transformant en un fléchissement qui a duré plus de deux ans. Après cette correction, l’activité est revenue à un rythme d’évolution plus raisonnable, mais bien fondé. Ce parcours nous est tracé ici par Tariq Sijilmassi, président de la Fédération nationale des associations de microcrédits (FNAM). Ce dernier revient également sur la question du remboursement de ces petits prêts, qui s’est stabilisé à son avis et au taux d’intérêt. A ce sujet, M. Sijilmassi a insisté sur le fait que si les taux sont élevés, c’est uniquement en lien avec le coût de revient, car le microcrédit ne génère pas de bénéfices.
Le Matin : Comment se comporte actuellement le secteur du microcrédit ?
Tariq Sijilmassi : À un certain moment, le microcrédit a grandi trop vite. Après, on a assisté à une crise de croissance du secteur durant une période de 2 ans à 2,5 ans, où il fallait se calmer, assainir les portefeuilles et entreprendre une action de formation des agents. Cette formation était vitale du fait que ces agents sont seuls face aux clients, sans aucune information comptable ou autre.
Donc pour pouvoir avoir une information fiable, il faut avoir un agent fiable. Maintenant, le microcrédit est en train de sortir de sa petite crise et d’ailleurs tous les chiffres le prouvent. Après avoir marqué un palier, le secteur repart à la hausse.
Et qu’en est-il des remboursements ?
Le remboursement s’est stabilisé. On a passé une dizaine d’années avec un taux de remboursement de 99,5%. C’était incroyable, ce n’était peut-être même pas véridique. Après on a eu une crise, on a eu peur que ce taux descende. Aujourd’hui, il s’est stabilisé à peu près à 95%.
On reproche souvent aux acteurs du microcrédit de pratiquer des taux d’intérêt élevés. Est-ce fondé ?
C’est vrai que les taux sont élevés, mais c’est lié uniquement au coût de revient. En effet, au micro crédit, il n’y a pas de bénéfices. Et quand on parle du coût de revient, c’est une somme du coût de l’argent, des frais d’ouverture des comptes dans des endroits très éloignés, du fait qu’il y a au moins 5% du taux de chute…, avec tout cela, on arrive à ces taux-là. Mais le microcrédit ne génère pas de bénéfices, c’est une activité non lucrative.
Donc, il faut qu’on travaille poste par poste. Ainsi, il faut baisser le coût de l’argent, en cherchant de l’argent moins cher, car les acteurs du microcrédit ne travaillent pas avec des fonds propres, mais avec de l’argent qu’on leur prête.
Il y a aussi les coûts de gestion qui sont extrêmement élevés, car on travaille sur peu de clients dans des zones très éloignées. Parmi les moyens qui permettent cette réduction des coûts de gestion, on note surtout l’informatisation et l’utilisation des nouvelles technologies, telle la téléphonie mobile. Et puis nous travaillons également sur l’élargissement de la gamme de produits avec la micro-assurance, la micro-épargne… et enfin nous agissons sur la consolidation de la qualité des portefeuilles des associations et sur le taux de chute, car celui-ci est répercuté dans le coût. C’est mécanique. C’est vrai donc que le taux d’intérêt est élevé, mais ce n’est pas parce qu’on tire des bénéfices de cette activité, mais c’est juste parce qu’on répercute le prix de revient.

Le cadre juridique révisé

Le conseil du gouvernement a examiné et adopté, il y a quelques semaines, le projet de loi 41-12 modifiant et complétant la loi 18-97 relative aux microcrédits lors d’une de ses réunions hebdomadaires.
Ce texte vise en particulier à faciliter les activités liées au microcrédit à travers une association ou une société de participation.
Cette facilitation se fera directement à travers une association de microcrédit, ou indirectement par le biais d’une autre association de microcrédit ou d’une société de participation agréée par Bank Al-Maghrib comme établissement de crédit, régi par la loi 34-03 relative aux établissements de crédit et organismes assimilés. Le projet de loi complète également l’article 10 de la loi 18-97 afin de permettre aux associations de micro crédit d’intégrer parmi leurs ressources les produits des participations au capital des établissements de crédit dûment agréés.
Par ailleurs, le projet de loi prévoit la soumission des opérations de fusion de deux ou plusieurs associations de micro-crédit ainsi que celles relatives à l’absorption d’une ou plusieurs associations de micro-crédit par une autre association de micro-crédit à l’octroi d’une nouvelle autorisation par le ministre chargé des finances et ce, après avis du conseil consultatif du microcrédit.
Publié le : 23 Mai 2012 - Propos recueillis par Lahcen Oudoud, LE MATIN

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