Pages

samedi 18 août 2012

Entretien avec le DG de la FBPMC : Le micro-crédit, une arme contre l’exclusion sociale


On ne saurait évoquer la protection et la cohésion sociales sans parler du micro-crédit. Mais, ce secteur, qui engageait plus de 1,2 million de bénéficiaires en 2008-2009, a été victime de son succès pour ainsi dire et a connu de sérieuses difficultés, marquées notamment par la croissance du parc des impayés ou l‘impossibilité d’accéder à des refinancements. Une restructuration s’imposait, et cela a été réussi grâce à la fusion de deux des principaus acteurs du micro-crédit au Maroc, la Fondation Banque Populaire pour le Micro-crédit et la Fondation Zakoura, la première absorbant la seconde.Pour parler de cette « remontée » et du rôle du micro-crédit dans la cohésion sociale, La Nouvelle tribune a rencontré M. Mustapha Bidouch, directeur général de la Fondation Banque Populaire pour le Micro-crédit
La Nouvelle Tribune :
Comment se porte aujourd’hui le secteur du micro-crédit ?
M. Mustapha Bidouj:
Après trois années difficiles (2007, 2008 et 2009), marquées notamment par une grave détérioration du portefeuille clients des Associations de Micro-Crédit (AMC)  et un net ralentissement de l’activité, on constate depuis le dernier semestre 2010, une tendance positive de redressement de la plupart des indicateurs de l’activité du secteur national du micro-crédit particulièrement la qualité des engagements.
Cette amélioration est due à une meilleure gouvernance des institutions de microfinance, à une gestion du risque mieux maîtrisée (mise en place d’une centrale de risque et limitation des crédits croisés) et à un retour aux bonnes pratiques ayant toujours distingué le secteur de la microfinance (proximité, accompagnement et sensibilisation des clients).
 Il s’agit donc d’une tendance positive qui va durer ? 
Aujourd’hui, le secteur du microcrédit continue à capitaliser sur les efforts de stabilisation de son activité, avec désormais de nouveaux enjeux, portés sur la diversification des produits financiers (la microépargne, la microassurance, les transferts d’argent, les microcrédits destinés à la TPE et à la création d’entreprise …), le développement des services non financiers, et des systèmes de paiement basés sur les nouvelles technologies.
Est-ce que le microcrédit a contribué à la baisse du taux de pauvreté au Maroc ?
De nombreuses  études attestent de l’impact positif du micro-crédit et de la micro-finance sur ses clients, notamment en leur donnant l’opportunité d’investir dans leur activité et d’accroître leurs revenus. Ainsi, le micro crédit peut être assimilé aujourd’hui à un moyen parmi d’autres de lutte contre la pauvreté. Cependant, le micro crédit ne peut faire reculer le taux de pauvreté de manière unilatérale, sans l’appui de politiques et de structures agissant sur l’ensemble des indicateurs de pauvreté (qui sont entres autres l’éducation, le niveau de vie et l’espérance de vie).
 On constate que le microcrédit profite très majoritairement aux urbains et péri-urbains, existe-t-il des mécanismes pour toucher plus de pauvres en milieu rural ?
Effectivement, le micro crédit connaît un développement important dans les zones urbaines et péri urbaines pauvres et ce pour des raisons liées à l’accessibilité et à la forte densité des populations de ces zones. Ce développement est moins ressenti en milieu rural en raison de plusieurs obstacles liés notamment à la faible densité de la population rurale, à la dispersion de l’habitat et à un enclavement dû à la faible qualité des infrastructures (routes, télécommunications…).
Malgré ces contraintes, la Fondation, qui se fixe comme finalité d’aider les populations pauvres à devenir indépendants financièrement, a réussi à promouvoir le microcrédit dans les zones rurales enclavées, grâce à ses produits novateurs ayant pour objectif le soutien des activités génératrices de revenus dans ces milieux (Al Karaoui/le Rural, Al karaoui Ikhalass/ le Rural fidélisation et Salaf Attaaounia/ prêt Coopérative).
 Quels sont les moyens pour aller vers ces populations ?  
Dans cet effort de desserte du monde rural, la Fondation a mis en place, et ce depuis 2010, des guichets mobiles (Véhicules Vans). Il s’agit d’un nouveau mode organisationnel permettant de surmonter les contraintes liées à l’accessibilité en milieu rural. A cet effet, la Fondation dispose actuellement d’une dizaine de Guichets servant plusieurs communes rurales, qui sera renforcée au cours de cette année par une vingtaine supplémentaires grâce à une subvention de l’Agence du Partenariat pour le Progrès.
 Quelle est la situation actuelle de la FBPMC après l’absorption de la Fondation Zakoura pour le micro crédit ?
Après l’opération réussie d’absorption de la Fondation Zakoura qui a permis d’assainir et de stabiliser le secteur du micro crédit au Maroc, la FBPMC a su tirer les bienfaits de cette opération en conciliant le savoir faire des deux réseaux FBPMC et FZMC. Actuellement, la FBPMC est le deuxième opérateur sur le marché du microcrédit du Maroc avec une part de marché de 27 %.
 Peut-on avoir une idée sur le volume des crédits accordés par votre fondation, le nombre des bénéficiaires et les niveau de votre encours ?
Au 30/06/2012, le volume des prêts débloqués par la Fondation s’élève à 970 millions de Dirhams et un encours total des prêts de 1,6 milliards de Dirhams (soit 35 % de l’encours global du secteur) desservant plus de 220 000 bénéficiaires (soit 27 % de part de marché).
 Avec la crise, les impayés ont tendance à augmenter au niveau du secteur financier, qu’en est-il pour le micro-crédit ? Est-ce qu’on peut avoir une idée sur le taux des impayés ?
A la différence du secteur financier classique, la crise des impayés survenue entre  2008 et 2009 dans le secteur de la microfinance, était principalement due à la croissance rapide et non maîtrisée des institutions de microfinance, à la gestion inappropriée du risque et au manque de réglementation.
Le taux de portefeuille à risque du secteur est en continuelle baisse, il avoisine 5 %. L’amélioration de ce taux vient récompenser les efforts engagés par les opérateurs du secteur ainsi que les autorités de supervision et de tutelle.
 Est- ce que le nombre des bénéficiaires en pâtit ?
Le marché du micro crédit a enregistré une forte baisse du nombre de clients actifs entre 2007 et 2011 soit un taux avoisinant les 40 % et ce, suite aux actions d’assainissement des portefeuilles clients, de décroisement des prêts et de la radiation des impayés. Actuellement, le nombre de clients actifs du secteur avoisine les 800 000 bénéficiaires. Ce chiffre était plus important dans les années à forte croissance précédant la crise, qui était de plus de 1,2 millions de clients actifs.
L’année 2012 se présente comme une année de base pour une reprise soutenue de l’activité du microcrédit au Maroc et qui s’inscrit dans la continuité des efforts de stabilisation et de sortie de crise.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire