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vendredi 2 septembre 2011

Cartographie des acteurs de la microfinance


Cartographie des acteurs de la microfinance

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Les activités de microfinance sont assurées à travers le monde par des organisations que l’on appelle des institutions de microfinance (IMF). Elles évoluent au sein d’un secteur qui s’est structuré autour d’elles et qui inclut une variété d’acteurs. On peut regrouper ces acteurs en trois catégories?: services d’appui, État et financeurs.

Les organisations spécialisées sont des ONG et des bureaux d’étude qui ont développé une expertise spécifique en microfinance. Leur rôle est souvent déterminant au démarrage des IMF, puis en accompagnement du développement sur certains chantiers spécifiques (transformation institutionnelle, changement de système d’information…). On distingue deux types d’intervention : en consultance auprès du management (assistance technique) ou en prenant directement en charge le management de l’IMF pendant quelques années (comme opérateur).
Les réseaux d’IMF ont pour objectifs de faire circuler l’information, diffuser les meilleures pratiques, assurer la plus grande transparence et mener des actions de lobbying. Ils sont de plusieurs natures : associations professionnelles au sein d’un pays, associations internationales d’IMF partageant la même philosophie et réseaux d’IMF créés par une même organisation spécialisée.
Dans chaque pays, il a le rôle déterminant de mettre en place le cadre légal et réglementaire d’exercice de la microfinance (notamment la réglementation de la collecte de l’épargne, le plafonnement des taux d’intérêt, la fiscalité applicable, la protection du consommateur). L’État peut aussi intervenir directement dans le secteur de la microfinance, soit par une politique sectorielle spécifique de structuration du secteur, soit en refinancement via une banque publique.
 
Les financeurs publics ont joué et jouent encore un rôle fondamental dans la structuration du secteur. Leurs financements sont destinés soit à des IMF directement, soit à des organisations spécialisées, soit encore à des fonds de financement de la microfinance. Ils peuvent apporter des appuis en subvention (pour des prestations en formation et assistance technique auprès des IMF), des prêts concessionnels (démarrage d’IMF), des prêts plus commerciaux ou des garanties (mise en relation des IMF avec des banques commerciales), voire prendre des participations. Ces « bailleurs » ou financeurs publics ont contribué à former et renforcer le secteur dans son ensemble comme par exemple les associations professionnelles, les réseaux, les autorités administratives (États, banques centrales, législateurs). Ils ont aussi accompagné l’émergence d’un secteur privé dédié au financement de la microfinance, à travers la création des fonds spécialisés. Ces financeurs auront encore un rôle clé à jouer à l’avenir pour assurer le succès de la microfinance, par exemple pour financer et appuyer des IMF de taille intermédiaire et stimuler l’offre dans des zones encore trop peu desservies.
De nombreuses banques commerciales font preuve depuis plusieurs années d’un intérêt réel pour la microfinance. Elles ont d’abord commencé à intervenir au niveau local en accordant directement des financements à des IMF. Elles répondaient ainsi à un besoin de refinancement des IMF, qui est aussi une opportunité pour ces banques d’atteindre à travers elles un marché qu’elles ne touchaient pas auparavant. Aujourd’hui, de nombreux groupes bancaires, autant du Sud que du Nord, au niveau local ou international, ont adopté des stratégies spécifiques concernant la microfinance. Mais les niveaux d’implication sont variables, du simple prêt de court terme à un investissement en capital de long terme. En outre, ces interventions restent conditionnées par le niveau de rentabilité attendu des IMF, et elles se concentrent ainsi sur les institutions les plus rentables. Au-delà des effets de mode et des nécessités de la communication, cette implication des banques est nécessaire et doit être consolidée dans la durée.
Les fonds de financement spécialisés sont apparus à la fin des années 1990 et se sont multipliés depuis. Soutenus d’abord par les financeurs publics, ces fonds sont devenus le vecteur principal de l’investissement international privé en microfinance. Ils mobilisent des ressources au Nord pour aller les investir dans des IMF au Sud, en prêts ou en capital. Ces fonds développent des compétences financières et d’analyse propres à la microfinance. Ils peuvent bien sûr être plus ou moins « sociaux » ou « commerciaux » dans leur approche. Cependant, de même que les banques commerciales, on constate qu’ils financent souvent les IMF les plus performantes et les plus rentables. On voit néanmoins apparaître aujourd’hui des fonds spécifiques dédiés à certaines zones (Afrique, Asie du Sud-Est) et visant des IMF de taille intermédiaire qui étaient jusque-là délaissées.
Enfin, on observe l’émergence de nouveaux types d’acteurs. Leur essor est lié à l’accroissement des besoins de financement des IMF, au besoin de compétences financières pointues et à la connaissance grandissante de la microfinance par le grand public. Il s’agit notamment des agences de notation spécialisées (qui évaluent la performance d’IMF notamment à destination de financeurs potentiels), des plateformes de microcrédit en ligne (des sites web sur le modèle du « peer to peer » permettent aujourd’hui à des particuliers de prêter directement sur internet de petits montants à des micro-entrepreneurs) ou encore des sociétés de management de fonds (qui gèrent les investissements des fonds spécialisés).
Ainsi, le secteur de la microfinance est constitué d’un nombre important et croissant d’acteurs. Pour être complet, il faut mentionner en conclusion les clients des IMF, dont la satisfaction est la finalité de tous ces acteurs et qui jouent un rôle déterminant, non seulement comme emprunteurs mais bien souvent aussi comme épargnants. Grâce à leur épargne, ils sont la première source de financement de la microfinance dans le monde.

Jérémy Hajdenberg, Investisseur et Partenaire pour le développement (I&P)

Tiré du Guide de la microfinance, Éditions Eyrolles, 2009, avec l’autorisation de l’éditeur

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